Interview de Maître GAYRAUD, Président de la Chambre des Notaires de l’Hérault
Président de la Chambre des Notaires de l’Hérault depuis septembre 2020, Maitre GAYRAUD nous présente son quotidien et sa vision du mandat de Président de la Chambre ainsi que les adaptations nécessaires qui ont dû être mises en place depuis le début de la crise sanitaire. Interview.
Bonjour Me GAYRAUD. Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ainsi que les principales missions de la Chambre des notaires ?
Merci pour cette interview, je me réjouis tout d’abord de ce partenariat avec votre institution. Mes confrères m’ont fait l’honneur d’accepter que je prenne la présidence au mois de septembre 2020, en pleine période de crise sanitaire, période un peu compliquée pour animer et représenter une Chambre mais je m’y attelle avec toute l’énergie que cela demande. J’ai 53 ans, je suis marié et père de 2 enfants. J’ai été nommé notaire associé en 2003 au sein de la compagnie de l’Hérault. Les fonctions de la Chambre des Notaires sont d’abord de la représenter au niveau de la compagnie vis-à-vis de nos instances supérieures : le Conseil régional des notaires qui regroupe les 4 chambres de la Cour d’Appel de Montpellier c’est à dire l’Aude, l’Aveyron, les Pyrénées-Orientales et l’Hérault et le Conseil Supérieur du Notariat qui est l’instance nationale. Au niveau du Conseil Régional, le département de l’Hérault représente à lui seul la moitié des notaires de la Cour d’Appel de Montpellier comptant 311 notaires répartis sur environ 130 Offices, ce qui permet également à la Chambre d’être visible au niveau national. La Chambre des Notaires est un organisme professionnel sous la tutelle du Ministère de la Justice et au niveau local du Procureur de la République concernant la déontologie et la responsabilité professionnelle. Nous sommes en lien également avec Monsieur le Préfet de l’Hérault et toutes les instances administratives nationales. Rôle donc de représentativité, mais également de coordination. Nous animons une compagnie de 311 notaires et il est important d’impulser des objectifs communs. Dès le début de mon mandat au mois de septembre, j’ai développé plusieurs axes de développements et d’animation pour notre compagnie. Tout d‘abord, en dehors même de la crise sanitaire, le développement des réseaux sociaux a facilité les échanges auprès des partenaires professionnels, dont vous faites partie, mais aussi de nos confrères et de nos clients qui sont demandeurs d’informations et d’actualités, et enfin auprès de la jeune génération qui, aujourd’hui, est plus sensible aux réseaux sociaux qu’aux périodiques. Puis, comme nous avons toujours fait, le lien avec le public dans les salons, les conférences et autres événements.
Le deuxième axe de développement de la compagnie se situe au niveau économique puisque notre profession, avec la loi croissance dite « loi Macron », a connu une explosion démographique importante. Nous étions il y a 5 ans, 180 notaires dans le département de l’Hérault et nous sommes aujourd’hui 311. Il faut faire vivre cette compagnie en lui donnant aussi du pouvoir d’achat. Pour cela, nous avons des axes de développement traditionnels comme le droit immobilier, le droit de la famille, le droit des affaires, et à cela s’ajoute un autre axe de développement qui fait partie de notre ADN de notaire, celui de la négociation immobilière. Nous avons, en ce sens, un partenariat avec la compagnie du Gard et nous avons créé une association qui regroupe 30 études entre les deux départements limitrophes qui sont le Gard et l’Hérault afin de développer la négociation immobilière. Concernant les aspects financiers, nous avons dû également adapter notre gestion face à nos effectifs. Il est impératif d’établir un budget prévisionnel cohérent afin qu’il soit voté par nos confrères, c’est un domaine que je prends également à cœur.
Troisième point que j’ai développé, l’accueil et la formation des jeunes notaires associés, mais également les notaires salariés qui représentent un tiers de notre compagnie. Il est en effet important de motiver les jeunes notaires à prendre des responsabilités auprès des instances et de les former (puisque plus du tiers sont arrivés en l’espace de quelques années) dans les domaines de l’éthique, de la déontologie et des responsabilités d’un notaire.
Un dernier axe qui me tient à cœur également est la professionnalisation de notre instance. La démographie notariale héraultaise étant importante, on ne peut plus gérer la Compagnie de manière artisanale. Un Président à lui seul ne peut pas orchestrer 311 notaires et représenter la Chambre au niveau des instances. J’ai donc engagé, depuis le début de mon mandat, une volonté de management de notre compagnie au niveau du bureau de la Chambre représenté par le Président, le Vice-Président, le Trésorier, le Secrétaire et le Rapporteur afin de garantir une politique pérenne au niveau du personnel mais aussi du développement de la compagnie. Voilà les principaux enjeux de notre compagnie.
Vous avez pris vos fonctions pendant la crise sanitaire dans un contexte difficile. Quels ont été les impacts sur le début de votre mandat ?
Représenter et animer une compagnie alors que nous étions chacun confinés dans nos études ou en télétravail a été une mission difficile. Je me suis rapproché de certains confrères afin de m’assurer que les liens avec le personnel et l’étude restaient fluides en cette période de confinement. Avant même le début de la crise, j’avais déjà l’idée de développer la communication numérique, la crise sanitaire n’a été qu’un accélérateur de sa mise en place. Face à l’évolution des conditions sanitaires nous étions dans l’incertitude, jusqu’au dernier moment, de pouvoir maintenir l’Assemblée Générale statutaire de la Compagnie en juin mais nous avons eu la chance de pouvoir enfin nous réunir dans le respect des consignes sanitaires ce qui a permis d’acter de grandes décisions jusqu’à la prochaine Assemblée Générale de novembre.
La chambre à signé la charte de partenariat ACTIMMO le 28 janvier 2021 s’engageant ainsi sur la thématique de la rénovation énergétique. Quelle place occupe cette question dans le métier de notaire en 2021 ?
Je pense que c’est une préoccupation importante. La profession, au niveau de nos instances nationales et du Conseil Supérieur du Notariat, a pris en main, depuis déjà quelques années, la thématique de la rénovation énergétique dans le cadre d’une politique verte, puisque nous sommes l’un des acteurs pivots du marché immobilier. Nous sommes conscients de l’importance de prendre en considération cette problématique. Certains l’ont pris en compte rapidement parce que cela faisait partie de leur éthique, d’autres parce qu’ils se sont aperçus que, faisant partie du maillage de l’immobilier, c’était une thématique qu’ils ne pouvaient pas ignorer. Enfin, les pouvoirs publics nous demandent d’intégrer cet axe à travers leur politique environnementale. Je vous confirme que c’est une question qui occupe également une place importante au niveau du Conseil Supérieur du Notariat. C’est un des enjeux prochains majeurs qu’on nous demande de mettre en place.
Depuis 2014, le site notaire de France a réalisé 4 études nationales sur la valeur verte des logements qui démontrent l’augmentation de la valeur vénale d’un bien immobilier rénové énergétiquement par rapport à un autre en se basant sur le DPE (Diagnostic de Performance Energétique).
Peut-on parler d’un nouveau critère central dans le processus d’acquisition d’un bien ?
Je pense qu’aujourd’hui, le DPE, du fait de sa réforme qui est entrée en vigueur au 1er juillet 2021, va devenir un élément qui va compter sur la prise de décision des acheteurs. On sent qu’il va monter en puissance parce que, jusqu’à aujourd’hui, il n’avait qu’une valeur informative. Entre-temps, Il y a eu la crise sanitaire, nous avons pu constater des déplacements de population plus ou moins importants et un engouement pour investir dans des maisons secondaires surtout dans certains secteurs du littoral et de l’arrière-pays. Aujourd’hui, compte-tenu des contraintes environnementales et de la politique verte, les particuliers s’aperçoivent que, pour tous les biens classés en G, la location du bien ne sera désormais plus possible ce qui engendrera également une répercussion à la baisse du prix de vente. La réforme sur le DPE va avoir un impact direct sur le marché immobilier et sur le prix de vente en prenant en compte le coût supplémentaire pour remettre en conformité le bien face aux critères énergétiques imposés par ce DPE.
Le 1er juillet 2021, le nouveau DPE rentrera donc en vigueur : quel est votre regard sur l’arrivée de cette nouvelle mouture attendue ?
J’en suis fort satisfait, le DPE n’avait jusqu’ici qu’une valeur informative. Face aux flux d’informations que nous avons au sein de notre société, il est important de normer des critères afin qu’ils en deviennent impératifs, c’est donc une très bonne chose que le nouveau DPE devienne juridiquement opposable aux tiers.
Avez-vous un conseil ou un message à destination des futurs acheteurs ou futurs vendeurs ?
Que ce soit pour les acheteurs ou pour les vendeurs : anticipez !
Ne vous précipitez pas, même si le marché peut sembler parfois tendu, il est important de prendre connaissance des résultats du DPE, de chiffrer les travaux à effectuer, de vérifier que les travaux faits par le vendeur soient couverts par une assurance dommage ouvrage décennale, de prendre connaissance de l’état financier de la copropriété dans laquelle vous achetez, du montant des charges … C’est le rôle du notaire de prévenir ses clients de tous ces aspects, de vérifier au niveau du service de l’urbanisme que le bien est exempt de servitudes ou d’autres obligations, d’informer sur la condition suspensive de prêt, d’indiquer la répercussion d’une plus-value sur le bien vendu face au Trésor Public et également au niveau de la famille.
En prenant toutes ces précautions en amont, c’est la garantie pour le vendeur et pour l’acquéreur d’une vente réussie ! Si vous avez signé, après c’est un peu tard pour négocier, donc anticipez !
Aujourd’hui, les enjeux environnementaux sont primordiaux, nous sommes tous responsables et acteurs pour contribuer à la sauvegarde de la planète, donnons-nous les moyens d’y contribuer !
Merci Maitre GAYRAUD.